INFERNO

Sans contrefaçon, Aude Lachaise est bien une femme. Et c’est à la Maison des Métallos dans le cadre d’une programmation intitulée «la sensualité au féminin» qu’elle le revendique. Dans «Marlon», on la retrouve en woman-show exaltée, surchauffée par l’incarnation du désir que lui suggère la figure de Marlon Brando.

Performeuse de son état, Aude Lachaise suit la formation «Ex.erce» au Centre Chorégraphique National de Montpellier, sous la direction de Mathilde Monnier, pas la dernière connue non plus pour ses créations piquantes et sensuelles. Aude expérimente ensuite la scène avec entre autres, les chorégraphes Robyn Orlin et Olga Mesa. Appartenant un temps à un girls-band, «les Vraoums», elle révélait déjà d’autres talents. C’est cette fois seule en scène qu’elle assure le show en mode : stand-up.

La voyant débarquer sur scène en jeune active, direction l’after-work-party, on pouvait s’attendre à tout. Mais pas de musique, pas de boules à facettes, aucun élément de décor pour nous faire rêver. C’est sur son unique déhanché et chaussée de ses escarpins brillants qu’elle nous conduit à la question du soir, ou plutôt à la recette du jour : « comment faire prendre la mayonnaise ? « .

A partir de cette question existentielle mais somme toute cocasse, Aude observe son sujet dans le fond du bol, dosant avec goût les ingrédients de son humour et maniant le verbe d’une main d’experte. Parce que pour elle, «le cul c’est sans issue (…) alors que le sexe c’est complexe», même si «le sexe sans amour c’est comme un boulot pour lequel tu cotises pas», l’amour lui apparaît soudain comme «une arnaque religieuse». Ou comme cette mayonnaise qu’il ne faut cesser de remuer dans l’espoir de la voir se consolider.

Elle s’en remet alors à Marlon. Marlon, chez Aude, c’est l’incarnation du désir, c’est le manque. C’est «ce trou noir qui absorbe la matière et produit la matière» comme elle le décrit si soigneusement. Appeler à rejouer la scène avec lui, pour justement comprendre ce qui la traverse quand elle le voit sur le petit écran, c’est alors que le «triomphe de l’amour sur la vulgarité» se personnifie.

S’en suit une composition savoureuse de mots crus et de gestes démonstratifs quand Aude Lachaise embrasse le sujet de la sexualité. Avec son onctueuse allégorie de la mayonnaise et l’image sublimée de l’acteur de charme, elle excelle dans l’exercice de la démonstration. Se plaisant à décortiquer l’intimité, elle revient sur la « rencontre solidaire » dans tous ses états, jusqu’à inviter le spectateur à l’exercice d’une danse-contact improvisée autour de la combinaison du « mou » et du « dur ». Il n’aura pas fallu ce soir-là attendre très longtemps le volontaire bondissant sur le plateau.

Audrey Chazelle

Marlon, d’Aude Lachaise / «La sensualité au féminin », Maison des Métallos, 94 rue JP Timbaud, 75011 Paris / Location : 01 48 05 88 27 / Du 8 au 20 Novembre 2011