PIETER HUGO : THIS MUST BE THE PLACE
Correspondance aux Pays-Bas.
Photographie : Pieter Hugo – Exposition « This must be the place » du 8 juin au 2 septembre 2012 au musée de l’Elysée, Lausanne.
Né en Afrique du Sud, Pieter Hugo s’est fait connaître notamment par sa série «The hyena & other men». Il photographie alors des Nigérians vivant avec des bêtes sauvages, notamment des hyènes, qu’ils dressent afin d’en faire de petits spectacles de rue, dont ils vivent. L’une des photographies a reçu, notamment, le premier prix du portrait du World Press Photo 2005.
La série est fascinante à plusieurs titres : l’ambivalence apparente entre sauvage et civilisé, hommes et bêtes finissant par se rejoindre et se confondre autour de ces deux aspects ; les cadres de prises de photos (anodins, dans la rue, ou plus obscurs, dans un tunnel) ; l’ambiguïté entre réalité et représentation (les sujets étant également à la fois sujets d’une réalité sociale, et en représentation, habitués qu’ils sont à « faire le show », y compris, on peut l’imaginer, sur les photos) .
Cette série représente très bien le travail de Pieter Hugo, en reporter moins d’évènements particuliers que d’une réalité sociale, au Nigéria, au Ghana, en Afrique du Sud ou ailleurs. L’exposition permet un aperçu très clair de cette approche et des différents sujets abordés, d’autant plus intéressants qu’ils sont peu connus en Europe : des albinos à Nollywood (le Nigeria est le troisième producteur de films au monde), en passant par les familles sud-africaines, les « vestiges du génocide rwandais », les victimes du SIDA et la série très impressionnante « permanent error », qui rassemble des clichés pris sur une décharge de produits électroniques, au Ghana.
Comme dans ses autres travaux, cette série témoigne à la fois d’une réalité sociale majeure (une décharge ultra-toxique de produits électroniques dont l’Occident ne veut plus, ses conséquences sur la santé des habitants, l’économie qui se met en place pour en récupérer certains matériaux etc), et d’un réel travail artistique à la fois sur les formats, la composition et les couleurs.
C’est un des autres aspects très intéressants du travail de Pieter Hugo : certes, il photographie brillamment des sujets sociaux, en bon photojournaliste, mais ses travaux reflètent également une vraie recherche artistique, assez fascinante. La diversité des sujets abordés permet des approches artistiques variées (les scènes de Nollywood ne sont pas traitées tout à fait de la même façon que les portraits des albinos, ou les « vestiges » du génocide rwandais) et le choix de photographier des réalités sociales plutôt que des évènements ponctuels confère aussi une dimension particulière à cette œuvre, plus universelle et moins fixée dans le temps. En somme, il prend le temps d’appréhender de manière sensible ses sujets.
La force de certains portraits vient ainsi, notamment, qu’ils dépassent la situation socio-économique dans laquelle les sujets sont pris. Pointe alors, parfois, une réalité personnelle et existentielle unique. Les photos en deviennent à la fois plus mystérieuses et plus émouvantes. Sa dernière série rassemble des portraits de proches. Le travail des contrastes et des lumières est tel qu’on y voit toutes les imperfections de la peau, et l’on a presque l’impression de portraits pris en négatifs.
Pieter Hugo a mentionné dans de nombreux entretiens son doute par rapport à la capacité de la photographie de capter une réalité (notamment dans le fossé entre ce qu’il pense montrer et ce que le public perçoit), et à considérer même la photographie comme un art majeur. Il questionne les limites de la photographie. En alliant témoignage documentaire et recherche artistique, il en repousse déjà brillamment quelques unes.
Anne Pailhes
L’exposition a été produite par le Fotomuseum de La Haye, où elle fut visible du 3 mars au 20 mai. Elle sera présentée au musée de l’Elysée à Lausanne à partir du 8 juin prochain. C’est la première fois qu’une production du Fotomuseum part en tournée.
Liens : Site de Pieter Hugo : http://www.pieterhugo.com/
Site du musée de l’Elysée, à Lausanne : http://www.elysee.ch/
Site du Fotomuseum de La Haye (page sur l’exposition) : http://www.fotomuseumdenhaag.nl/index.cfm/site/Fotomuseum/pageid/27A68B25-F483-4175-D532C08E762C153D/objectid/455E3D26-02D3-9A26-2F1DFF1E7DD66CAD/objecttype/mark.apps.fotomuseum.contentobjects.exhibition/
Visuels : photographies Pieter Hugo / copyright Pieter Hugo et Fotomuseum La Haye 2012
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