UN TRES BEAU « TOSCA » DE PIERRE AUDI, EN GUISE DE TESTAMENT ARTISTIQUE

Tosca – Opéra de Giacomo Puccini – Melodramma en trois actes (1900) – D’après Victorien Sardou, La Tosca – Livret Giuseppe Giacosa et Luigi Illica – Mise en scène créée par Pierre Audi, reprise assurée par Marguerite Borie – Direction musicale Oksana Lyniv – Avec Saioa Hernandez (Tosca) et Roberto Alagna (Mario Cavaradossi) + chanteurs tournants – Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris – Maîtrise de Fontainebleau, cheffe de la maîtrise : Astryd Cottet – A l’Opéra Bastille jusqu’au 18 avril 2026.
A Rome, en juin 1800, dans l’église Sant’Andrea della Valle, Angelotti, prisonnier politique évadé du chateau st Ange, arrive en hâte, pour prendre une clef déposée à son intention et disparaît dans une chapelle latérale…Il n’est pas seul dans cette église, le hasard fait que son ami le peintre Mario Caravadossi est en train d’y réaliser une fresque. Celui ci le découvre et décide de l’aider à se cacher mais c’est sans compter sur la jalousie éruptive de son amante la cantatrice Floria Tosca qui croit percevoir une présence féminine…
Il y a foule pour cette première à l’Opéra Bastille pour voir ou revoir Tosca de Giacomo Puccini sous la direction d’Oksana Lyniv. C’est pourtant une reprise de la mise en scène de Pierre Audi qui date de 2014 et qui est déjà venue plusieurs fois à Bastille mais le succès de cette version ne se dément pas.
Tosca est le troisième opéra de Puccini avec un livret écrit par Giacosa et Illica. La version finale du livret été remaniée plusieurs fois pour aboutir à une oeuvre plus resserrée et pour accentuer la tension dramatique, qui monte crescendo jusqu’au final. La mise en scène très esthétique de Pierre Audi (reprise par Marguerite Borie depuis le décès de Pierre Audi en mai 2025) contribue à la montée de la sensation oppressante notamment avec un élément de décor impressionnant : une croix immense surplombe les superbes appartements de l’infame Sciarpia dans l’acte deux et cette même croix plane au-dessus d’une morne plaine dans l’acte trois. Cette croix, c’est bien sur le poids de l’église et de son omniprésence sur le quotidien de nos protagonistes. Les décors de Christof Hetzer pour les trois actes sont très travaillés : comme ce mur rouge sang incurvé vers le public et dont la porte fermée nous fait sentir le piège dans lequel Tosca se retrouve.
Oksana Lyniv dirige avec élégance et finesse l’Orchestre de l’Opéra de Paris et nous plonge dans l’action dès les premières mesures.
Tosca est incarnée par Saioa Hernandez qui faisait ses débuts à Bastille il y a trois ans dans ce même rôle et quels débuts ! Son chant a gagné en rondeur et en nuance. Elle joue à merveille l’amante à la jalousie aveugle tout comme la proie traquée par Scarpia, sans oublier la scène finale où son désespoir est palpable. Son Mario est le ténor Roberto Alagna, sa présence nous impressionne tant physiquement que vocalement, on en oublie qu’il a plus 60 ans tellement il est investit dans son rôle et sa voix est un bonheur, surtout dans l’acte trois où sa solitude et sa détresse ne nous laissent pas indifférents.
C’est Alexey Markov qui tient le rôle du baron Scarpia. De sa première apparition à sa mort, il impose un personnage d’une froideur que l’on adore détester. Ses costumes (Robby Duiveman) sont particulièrement réussis. Sa puissance vocale en fait un redoutable adversaire. Amin Ahangaran est Cesare Angelotti, convaincant dans son rôle et dont la voix semble porter la noirceur de son emprisonnement.
Il n’y aura pas moins de 5 Mario, 4 Tosca, 3 Scarpia et 2 Cesare qui vont se succéder pour les différentes représentations prévues jusqu’en avril 2026.
Carlo Bosi, Bernard Arrieta, André Heyboer et Florent Mbia complètent cette distribution de façon probante dans les rôles respectifs de Spoletta, un geôlier, un sacristain et Sciarrone.
Mention spéciale pour les Chœurs de l’Opéra de Paris pour son ‘Te deum’ très réussi.
Valérie Leah


Photos Vincent Pontet / OnP





















