FESTIVAL D’AUTOMNE. « NEXUS DE L’ADORATION », UNE LITURGIE PAÏENNE UN PEU VAINE

FESTIVAL D’AUTOMNE. “Nexus de l’adoration” – Conception, texte, musique, mise en scène, chorégraphie Joris Lacoste – Du 4 au 7 décembre 2025 – MC93 Maison de la Culture de Seine Saint-Denis.
Joris Lacoste, esquisse les contours d’un nouveau culte, cela se traduit par une liturgie hybride, ensorcelante et déjantée, qui est à la fois un inventaire libre et un kaléidoscope. On observe l’esthétique poétique de Joris Lacoste qui, avec une certaine malice, déploie un art de redonner du charme à l’ordinaire et à l’habituel, créant une magie grâce à des juxtaposition inattendues. Son spectacle est parsemée de clins d’œil cultivés, d’extraits parodiques et d’éclats formels.
Dans une atmosphère colorée et feutrée, neuf artistes se préparent à chanter, danser et se livrer dans un rituel infernal de plus de deux heures. Daphné Biiga Nwanak, vêtue en joueur de football, commence la performance pop-liturgique en représentant une intelligence artificielle. Ses gestes et sa voix sont robotisés, pour accentuer le réalisme, un bug s’immisce dans son intervention.
Sur scène, les artistes tous métamorphosés en marionnettes aux gestes ralentis, s’efforcent de projeter une multitude d’éléments divers : des modes d’existence, des réalités hétérogènes, des types de discours variés, parfois même contradictoires. Le rituel principal de cette croyance unique exige de « chanter tout ce qui existe, jusqu’à la fin du monde ». Les officiants entament une série de louanges où sont mentionnés et chantés tout autant des objets du quotidien que des figures fictives, des émotions, des sensations, des faits historiques, des idées abstraites, des animaux, des affections, des instants de la journée…
Cette suite se déploie progressivement sous des formes textuelles, musicales, théâtrales et des performances. Après une heure d’énumération incessante des objets de consommation ou moments du quotidien, parfois répétés en boucle, comme “le paquet de chips à l’ancienne” ou “l’entretien préalable à un licenciement”, on espère une rupture, un souffle qui nous est refusé tout comme à la société en détresse.
Le public qui n’est pas parvenu à se connecter à cette soirée transe est rassuré lorsque tout s’arrête et que Thomas Gonzales prend la parole, droit dans ses cuissardes, pour nous expliquer qu’il est naturel de ne pas tout saisir, car on ne peut pas tout comprendre au cours d’une vie, il suffit d’accepter ce que les choses sont. Le rituel reprend de manière plus intense, à l’exception du DJ qui se joint aux danseurs, le cérémonial demeure identique.
Un « Nexus de l’adoration » qui ne laissera pas son empreinte, même si Joris Lacoste a travaillé avec délicatesse et solennité pour proposer un objet théâtral qui met en évidence une société captive du consumérisme.
Béatrice Stopin

Photos C. Raynaud De Lage





















