LES RATES DE MONTPELLIER DANSE

Là Callas

Festival Montpellier Danse 2013 / Montpellier.

Yalda Younes et Gaspard Delanoë : Là, Callas

Deux espaces sont installés sur la scène : un micro-studio de télévision et un tapis blanc. Le spectacle sera sans cesse coupé en deux : les interventions gaguesques de Gaspard Delanoë et celles dansées et tragiques de Yalda Younes.

Gaspard Delanoë reprend plusieurs interview de Maria Callas, type Grand échiquier, mais n’en garde que les questions. L’accumulation de celles-ci crée une gêne et un certain voyeurisme. Cette partie s’enchaîne avec une bande-son de pas de danses pré-enregistrés que Yalda Younès marque (elle fait sans faire jusqu’au bout) en direct, sans chaussures et sans bruit, mais avec toute l’intensité d’un flamenco vécu du fond de l’âme plus que du fond du talon. C’est la première fois qu’on assiste à une danse en play-back ! Comme la diva lyrique, la danseuse a perdu son art, le corps ne suivant plus. Outre la ressemblance physique, cet égarement de parcours prend tout son sens et rend le spectacle juste et bouleversant. Un grand cri silencieux et brutal au bord de ses émotions, ce qui le rend encore plus touchant.

Les lumières d’Erik Houllier, utilisant à la fois des projecteurs mais aussi un vidéo-projecteur pour éclairer la scène par de l’image nous plonge à la fois dans les rayons des caméras de télévision, mais font aussi penser aux persiennes d’une petite maison méditerranéenne. A la fois dans l’intime et dans le récit public et vulgaire de cette intimité.

Le séquençage s’avère assez lassant et, encore une fois, on aimerait plus de danse et moins de réflexion autour du statut de l’artiste. D’autant plus que les élucubrations éculées sur le vedettariat, au bord de l’escroquerie, n’apportent pas grand chose à la réflexion (quel intérêt de mettre sur le même plan Kim Wilde, François Bayrou et La Callas?)

Un troisième personnage, incarné par Marta Izquierdo Munoz, n’apporte pas grand chose non plus, dans une immobilité mobile qui gagnerait beaucoup à être fixe, dans la seule présence corporelle. Dans une dernière scène, Yalda Younès jette du balcon tous ses souliers, souvenirs d’une gloire passée, mais qui, posés là, forment une œuvre d’art colorée et définitive.

Boyzie Cekwana et Panaibra G. Canda : The Inkomati (dis)cord

Le Théâtre universitaire de la Vignette (parce qu’il a été construit sur d’anciennes petites vignes) est souvent partenaire de MontpellierDanse pour des projets à la lisière du théâtre et de la danse. C’est le cas ici dans un spectacle qui porte un beau texte très poétique mais dont la mise en corps est confuse, morne et très ennuyante.

Simon Hecquet et Sabine Prokhoris : Elle m’avait pas dit tout ça…

Encore un spectacle où les créateurs ont envie de parler plutôt que d’agir. Dans un décor et des costumes beckettiens à souhait (le spectacle part de la pièce MayB de Maguy Marin), trois acteurs-danseurs disent ou écoutent un panachage de textes et tentent de se raccrocher à leur restant de vie. Pour une bonne moitié du spectacle, on n’entend pas le texte, le principe d’incarnation de la philosophie sur une scène vivante ne s’improvisant pas. Les interprètes manquent tout simplement d’une technique et d’une formation d’acteur. Pour une autre moitié, on n’entend pas le texte au premier sens du terme : la bande son le diffusant du fond de la scène, faiblement, un montage sonore au dessus. Autant chez une Nacera Belaza ou un Denis Mariotte, la réflexion crée de l’image et nous embarque, autant là, on nous montre sur un plateau la verrue molle de leur divagation, qui ne passe pas la rampe. Sur les trois performeurs, seul Matthieu Perpoint réussit à nous transmettre les textes qu’il prend en charge, tout en les incarnant charnellement (et avec quel vénusté). Il réussit, d’un texte et d’un mouvement assez obscurs, à rendre tout cela dans la clarté pour atteindre non les étoiles, mais dans le brouillard d’une condition sociale à la déroute. Le tout plongé dans un éclairage recherché, plutôt novateur, ce qui est assez rare en danse pour être souligné. Le public part avant la fin, n’applaudit pas ou peu car il n’y a malheureusement pas grand chose de réjouissant dans ce spectacle…

Bruno Paternot

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