FESTIVAL D’AVIGNON: « LE SOMMET » DE MARTHALER EN MANQUE D’OXYGENE

79e FESTIVAL D’AVIGNON : « Le sommet » – Christoph Marthaler -à la Fabrica les 12, 13, 14 et 17 Juillet à 13h et le 16 Juillet à 13h et 20h – Durée 2h.
Cette année est l’année des retours, après Thomas Ostermeier et son Canard Sauvage joué à l’Opéra d’Avignon, c’est le metteur en scène suisse Christoph Marthaler qui revient au Festival après 15 ans d’absence, ayant été artiste associé en 2010. Autant dire que là encore l’attente du public est palpable.
La scène s’ouvre sur un chalet, comme posé sur le sommet d’une montagne qui d’ailleurs dépasse du sol, un rocher au milieu de la seule pièce apparente, au fond un énorme passe-plat d’où vont arriver les protagonistes de cette vaste loufoquerie. Six marcheurs aux habits un peu vieillots vont donc se retrouver contraints de rester dans cette bâtisse, au sommet de cette montagne, ils sont tous de nationalités différentes et ne se comprennent pas. Simples riches marcheurs ? Émissaires de politiciens européens incapables de la moindre entente ?
Christoph Marthaler n’en dévoile pas plus mais offre un moment de pure folie absurde ou les chants se mélangent aux rires dans des séquences de plus en plus loufoques.
Dans ce huis clos alpin ils arrivent tous, trois hommes et trois femmes, par ce simple monte-plats, seul élément de connexion avec le monde extérieur, et atterrissent directement dans ce chalet de bois avec tout leur barda, en bon européens. A leur arrivée, ils trouvent évidemment un petit guide officiel leur permettant d’apprendre quelques mots dans la langue de chacun, peine perdue. Cet instant donne le la d’une suite de séquences absurdes où il est évident que chacun ne va rien comprendre de l’autre et que tout signe de compréhension ne sera qu’un signe de façade.
Qu’ils soient en tenue de marcheur ou en tenue de soirée, les six compères, toujours très policés dans leurs relations ont beau y faire, l’incompréhension reste de mise. Seuls les rires loufoques sont à l’unisson même s’il est évident que là encore ils ne rient pas des mêmes choses ou au même moment. Comme un écho à la multitude d’événements climatiques qui sont survenus ces dernières années en montagne : inondations, coulées de boue, effondrements… Christoph Marthaler enferme durablement les six acolytes dans leur chalet durant une quinzaine d’année à la suite de la coupure ded routes dans la vallée. On se surprend à les plaindre, eux qui, on le sait maintenant, sont aussi responsables de leur état.
Même si la douce folie fait souvent rire et prend un tour très poétique, la marche jusqu’au sommet peut paraître un peu longue, et vers la fin on se surprend à regarder un peu de loin cette bande de pieds nickelés. Certains pourront se laisser happer et entraîner, quand d’autres trouveront que le temps s’étire avec l’altitude ou le manque d’oxygène, même si les six comédiens ,dont certains travaillent avec Christoph Marthaler depuis plusieurs années, incarnent tous avec une délectation apparente cette douce folie souvent communicative. Quelques uns vont un peu s’ennuyer tandis que d’autres se laisseront faire et embarqueront avec cette joyeuse bande dans cette proposition décalée.
Pierre Salles

Photos C. Raynaud De Lage





















