BIENNALE DE VENISE 2013 : LE PAVILLON ANGLAIS FAIT POLEMIQUE AVEC SON « COLLECTIONNEUR » RUSSE MAFIEUX…
55e Biennale de Venise : Jeremy Deller présente la collection du Wende Museum dans le Pavillon britannique. / Giadini de La Biennale / Du 1er juin au 24 novembre 2013.
Le Pavillon britannique de La Biennale fait polémique dans le petit monde de l’art… En effet, il expose l’artiste Jeremy Deller, qui a suscité une controverse sévère en Angleterre en présentant une oeuvre provoc, issue du Wende Museum, soit une installation de coupons et certificats provenant d’oligarques russes, auto-intitulés « collectionneurs » d’art, dans ce qu’il a nommé « La salle Russe » du Pavillon…
We Sit Starving Amidst Our Gold, est une large fresque mettant en cause le magnat russe Roman Abramovich, dont la fortune comme tous les oligarques sous Poutine (et Poutine lui-même), a une origine plus que douteuse, mais qui est considéré par le milieu de l’art peu regardant, comme un collectionneur « honorable » et en tout cas honoré. Pour tout dire, l’un des principaux de la scène internationale, judicieusement protégé par l’Etat britannique, dont il est « résident », ce qui lui confère une honorabilité sans conteste… Abramovich est de surcroît l’un des « résidents » de sa Majesté les plus fortunés du Royaume-Uni. La source mafieuse de sa fortune est donc éclairée par l’artiste britannique, au grand dam de tous…
Jeremy Deller montre ainsi ce dont le Wende Museum a fait récemment l’acquisition, soit une importante collection de coupons d’actions du début de l’ère Gorbatchov, des documents bidons délivrés aux travailleurs russes, vendus comme parts de propriété d’investissements réalisés par des oligarques du système russe, parmi lesquels Roman Abramovich, résident britannique de Sa Majesté et « collectionneur » notoire et estimé.
Ce sont en fait des coupons émis par des entreprises mafieuses, qui ont construit la fortune actuelle de ces oligarques. Jeremy Deller, qui fut lauréat du prix Turner en 2004, montre ainsi les connections immorales qu’il existe entre marché de l’art et mafias internationales, à travers cet exemple plus que parlant. Sa collection de titres bidons qu’il expose au pavillon britannique, est là pour rappeler que l’argent de l’art a bien souvent une provenance, et une odeur : celle de la magouille de certains capitalistes sans scrupule, dorés d’une posture de « collectionneurs » qui, après avoir fait fortune dans des conditions criminelles, blanchissent leur fric dans le marché -juteux- de l’art, contemporain ou non, acquérant ainsi, à bas prix finalement, une respectabilité de bon aloi, à laquelle toutes les sirènes du milieu -artistes, marchands, curateurs, presse, collectionneurs… semblent désormais sensibles, se bouchant le nez sans repentir…
Bref, une très jolie histoire morale… Que « English Magic » retrace avec conviction au Pavillon britannique jusqu’au 24 novembre prochain…
M.R.