NÚ BARRETO, « HOMO IMPARFAITS », NATHALIE OBADIA BRUXELLES

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NÚ BARRETO – Homo Imparfaits – Galerie Nathalie Obadia Bruxelles – Jeudi 5 Septembre – Samedi 26 Octobre 2019.

La Galerie Nathalie Obadiaprésente Homo Imparfaits, la première exposition personnelle de Nú Barreto à Bruxelles.

Né en 1966 à São Domingos en Guinée-Bissau, Nú Barreto vit et travaille à Paris depuis 1989. Choisi pour représenter son pays à l’Exposition Universelle de Lisbonne en 1998, il mène depuis une carrière internationale qui le distingue parmi les artistes majeurs de l’art contemporain africain.

En 2006, Nú Barreto exposait pour la première fois en Belgique en participant à Afrique-Europe : rêves croisés, exposition collective organisée par la Commission européenne1.

Pour sa nouvelle exposition, l’artiste bissau-guinéen présente un ensemble de dessins inédits et plusieurs peintures issues de sa fameuse série États Désunis d’Afrique amorcée en 2009. Toutes les œuvres exposées sont fidèles à l’engagement politique de Nú Barreto. Elles décrivent les maux de la société contemporaine africaine tout en ravivant l’espoir d’une Afrique qui se libèrerait de son passé pour mieux se réinventer.

Depuis l’enfance, le dessin est le médium de prédilection de Nú Barreto. Des villages voisins, les autres enfants venaient voir ses dessins qui faisaient la fierté de ses parents. De cette époque, ses œuvres sur papier ont gardé leur verve imaginative qu’il met aujourd’hui au service de son récit personnel de l’Afrique contemporaine. Ce dernier n’est pas tendre, il est même la plupart du temps âpre et piquant. Sous la mine acerbe de ses crayons et le rouge sang de ses pinceaux, Nú Barreto illustre les violences multiples qu’a subies le continent africain.

Au cœur de cette réalité quotidienne, l’homo imparfait de Nú Barreto incarne le premier rôle. Comme un miroir, cet alter ego d’encre noire et rouge nous renvoie notre propre inconstance et nous confronte face à notre responsabilité à l’égard de la situation actuelle en Afrique.

L’homo imparfait est à l’image de son patronyme. Son corps est déformé par la douleur et la peur. Sa bouche hurlante témoigne, selon l’artiste, aussi bien des souffrances quotidiennes du peuple africain que de celles de sa mémoire collective. En ce sens, l’artiste Francis Bacon, qui a si bien décrit la douleur dans ses tableaux, est une source d’inspiration revendiquée par Nú Barreto citant aussi Lucian Freud, Willem de Kooning, ou encore la peintre portugaise Paula Rego parmi son panthéon d’artistes de référence. De cette dernière, il retient le subtil mélange de réalisme et de symbolisme qu’elle utilise pour exprimer sa satire de la société.

Dans les compositions de Nú Barreto, l’absence de fond, comme celle de tout repère spatial, procure un sentiment de vertige. Comme un funambule, l’homo imparfait avance en équilibre sur le fil tendu qui traverse les dessins de part en part. Dans la symbolique de l’artiste, celui-ci représente la « ligne de vie », et son omniprésence trahit la fragilité de l’existence autant que sa permanence.

D’autres objets fétiches se retrouvent de feuille en feuille, comme la chaise ou l’échelle. La première, avec son pied brisé, symbolise l’instabilité chronique des états africains. La seconde, avec ses barreaux cassés, est la métaphore de l’ascenseur social en panne dont le dysfonctionnement concourt à la montée des inégalités. On trouve aussi dans le répertoire des symboles de Nú Barreto des animaux (corbeaux, porcs, caméléons, etc.) et des objets hors d’usage tels que des vélos ou des guitares. Plus curieux encore, il pleut des bananes, des clous, et même des parapluies ouverts ou fermés. Cette panoplie de symboles puise ses origines dans le creuset des cultures autochtones d’Afrique de l’Ouest dont les productions artistiques avaient, elles aussi, recours au pouvoir des signes. Pour compléter sa sémantique personnelle, l’artiste joint l’usage expressionniste de la couleur rouge qu’il a choisie pour sa force symbolique. Les papiers, lacérés ou déchirés, participent également à la représentation du paysage tourmenté que l’homo imparfait façonne à son image. L’ensemble des ressources iconographiques et plastiques que Nú Barreto emploie dans ses œuvres sur papier dégage une puissance évocatrice et émotionnelle forte, similaire à celle des dessins de l’artiste sud-africain William Kentridge.

Les grandes peintures de Nú Barreto sont issues de la série États Désunis d’Afrique. En changeant les couleurs de la bannière étoilée américaine par le rouge, le jaune et le vert, soit les trois couleurs que l’on retrouve le plus dans les drapeaux des cinquante-quatre états africains, l’artiste pointe la désunion de son peuple qu’il tient pour responsable des maux de la société africaine. Selon lui, c’est cette incapacité à regarder ensemble dans la même direction qui cultive la dépendance des nations africaines à l’égard des puissances extérieures à leur continent. Les étoiles noires dispersées de manière anarchiques sur les bandes déchirées des drapeaux panafricains de Nú Barreto sont à l’image de la situation qu’il dénonce.

Derrière la portée contestatrice de son œuvre, l’artiste conserve une confiance indéfectible en l’humain et surtout en son homo imparfait dont il tourne en dérision les travers afin qu’il puisse les corriger de lui-même. Ce pouvoir vertueux de l’art inspire à l’artiste des œuvres pleines d’espoir comme La Source où, après chacune des étoiles de son drapeau, est accroché le livre d’un auteur africain. À eux seuls, ces ouvrages symbolisent l’ensemble des ressources intellectuelles et culturelles des nations africaines. Une manière métaphorique pour Nú Barreto de signifier à ses contemporains que l’Afrique doit, et peut, prendre son destin en main.

Né en 1966 à São Domingos (Guinée-Bissau), Nú Barreto vit et travaille à Paris depuis 1989.

Diplômé de l’École Nationale des Métiers de l’Image des Gobelins (Paris, France), Nú Barreto développe une œuvre pluridisciplinaire et engagée en créant une sémantique qui lui est propre. L’œuvre singulière de Nú Barreto est très vite remarquée. En 1998, il représente son pays à l’Exposition Universelle de Lisbonne (Portugal). Il mène depuis une carrière internationale qui le distingue parmi les artistes majeurs de l’art contemporain africain.

En témoignent les nombreuses expositions personnelles et collectives qui lui sont consacrées dont, en 2019, «AFRO, Rencontres avec l’art de l’Afrique contemporaine » au Centre culturel de l’Escale à Levallois-Perret (France) ; en 2018, « 0.10 RELOADED Avant-Garde » à la Galerie Sabine Knust à Munich (Allemagne) où il expose aux côtés de William Kentridge, El Anatsui et Isaac Julien ; entre 2015 et 2018, la très grande exposition itinérante « Lumières d’Afrique » au Palais de Chaillot à Paris, (France), à la Fondation Donwahi à Abidjan (Côte d’Ivoire), au Musée IFAN à Dakar (Sénégal), au Palais des Nations à Genève (Suisse), à l’Union Africaine à Addis-Abeba (Éthiopie), et au EUMETSAT à Darmstadt (Allemagne) ; en 2016, « Hommage à la Biennale d’Art contemporain africain de Dakar » à Martigny (Suisse), et l’exposition « Convergences » au siège de l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africain (UEMOA) à Ouagadougou (Burkina-Faso).

En 2015, il bénéficie de sa première exposition personnelle en Chine, « Ressonância », au Taipa House Museum à Macao (Chine) et participe à l’exposition « Rastros » au Musée Capixaba do Negro (MUCANE) à Vitória (Brésil). S’ensuivent, en 2013, l’exposition au Musée Boribana à Dakar (Sénégal) ; en 2012, « Fundação PLMJ, 100 obras – 10 años » à la Fondation Arpád Szenes et Viera da Silva à Lisbonne, PLMJ (Portugal) ; en 2011, l’exposition à la Fondation de l’Amérique latine à São Paulo (Brésil) ; en 2010, la Biennale de São Paulo (Brésil) ; en 2007, « Quand l’Afrique s’éveillera » à la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette à Paris (France). En 2006, il participe à la célèbre Biennale d’Art contemporain africain de Dakar (Sénégal), et à l’exposition organisée par la Commission européenne, « Afrique Europe – rêves croisés », à la Galerie Les Ateliers des Tanneurs à Bruxelles (Belgique).

Les œuvres de Nú Barreto figurent dans de grandes collections institutionnelles parmi lesquelles, au Brésil, le Musée Capixaba do Negro (MUCANE) à Vitória ; au Portugal, la Fondation Pro-Justitiae à Porto, et la Fondation Arpád Szenes et Viera da Silva (PLMJ) à Lisbonne ; en Afrique, l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africain (UEMOA) à Ouagadougou (Burkina-Faso) ; et en Chine, le Taipa House Museum à Macao.

1. « Afrique-Europe : rêves croisés », exposition d’art africain contemporain organisée par la Commission européenne dans le cadre des Journées européennes du développement, Les Atelier des Tanneurs, 13 novembre-10 décembre 2006, Bruxelles, Belgique.

Image: Nú Barreto, Leader Sans Protection, 2019. Crayon céramique et collage sur papier, 85 x 114,5 x 5 cm – copyright the artist – courtesy Nathalie Obadia Bruxelles

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