JEANNE SUSPLUGAS, « I WILL SLEEP WHEN I AM DEAD », LA PATINOIRE ROYALE BRUXELLES

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Jeanne Susplugas – « I will sleep when I am dead » – La Patinoire royale / Galerie Valérie Bach Bruxelles – 10 septembre – 30 octobre 2021.

CES MYSTÉRIEUX PAPILLONS DE L’ÂME
En 1906, le neuroscientifique espagnol Santiago Ramon y Cajal reçoit le Prix Nobel pour ses travaux sur la structure du système nerveux. Grâce à la technique d’imprégnation argentique qui colorie les tissus nerveux, il distingue les neurones et étudie leur fonctionnement. Ses théories s’accompagnent d’extraordinaires et innombrables dessins.

« I will sleep when I am dead » pourrait être une mise en abyme des théories de cet illustre scientifique. Cette œuvre en réalité virtuelle (VR) offre une multitude de possibilités de voyages dans nos cerveaux parmi neurones, synapses et pensées matérialisées par le dessin. Guidé par nos mouvements oculaires, notre regard se pose tour à tour sur un ordinateur, une île, un palmier, une boule à neige, une caméra de surveillance, une maison, des pilules, une marionnette ou un crâne. Jeanne Susplugas déploie son vocabulaire artistique pour nous plonger dans nos propres cerveaux et illustrer son fonctionnement comme vu à travers un microscope.

Chaque exposition permet à l’artiste de raconter une histoire, un parcours qui invite le visiteur à s’interroger sur le monde et les croyances de nos sociétés. Les relations de l’individu avec lui-même et avec l’autre sont au cœur de ses projets qui mettent en exergue des dysfonctionnements sociaux tels l’enfermement ou les addictions et questionnent les notions d’intime et d’espace personnel.

Notre premier chez soi est notre corps, nos pensées habitent nos cerveaux à l’abri dans nos boîtes crâniennes. Jeanne Susplugas s’intéresse à cet espace intérieur qui nous définit, dissimule nos émotions, nos désirs et autres phobies.

Face à l’impossibilité de lire dans les pensées d’autrui, l’artiste les collecte à travers des discussions. Ces pensées ainsi livrées prennent forme à l’aide au dessin puis s’animent grâce à la réalité virtuelle qui offre la possibilité d’un voyage mental à l’intérieur de ce cerveau collectif construit à l’aide de ces différents récits. Cette œuvre fait écho à des thérapies médicales qui utilisent depuis quelques années cette nouvelle technologie pour améliorer la qualité des soins en développant l’hypnose, et en traitant certaines phobies ou des troubles post-traumatiques.

Les causes de nos troubles comportementaux sont multiples, de dérèglements chimiques aux multiples injonctions sociales. Pour tenir debout, différentes options s’offrent à nous, que ce soit la prise de substances ou la méditation, le yoga ou les thérapies familiales.

C’est bien de tout cela dont nous parle Jeanne Susplugas à travers une œuvre pluridisciplinaire et d’une esthétique séduisante en apparence mais vite inquiétante. Comment vivre, survivre, trouver le temps de réaliser nos rêves ? « Je dormirai quand je serai mort » avant « Je vais vivre tant que je suis en vie ». (1)

Mais je terminerai sur une réflexion de Ramon y Cajal qui considérait le cerveau humain comme l’organe le plus complexe de l’univers et les neurones comme de « mystérieux papillons de l’âme, dont le battement d’ailes pourrait un jour nous éclairer sur le secret de la vie mentale ».

Si le système neuronal nous limite autant qu’il nous donne des ailes, il reste pour l’instant un mystérieux terrain à explorer qui n’a assurément pas fini de nous surprendre.

Marta Ponsa, juillet 2021.

(1) Fragment des paroles de « I’ll Sleep When I’m Dead », Bon Jovi, 1992

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Images copyright the artist 2021

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