FESTIVAL D’AVIGNON. UN ENTRETIEN AVEC CHRISTOPHE RAUCK POUR « RICHARD II »

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76e FESTIVAL D’AVIGNON. Entretien avec Christophe Rauck – RICHARD II – Texte : William Shakespeare – Mise en scène : Christophe Rauck – Gymnase du Lycée Aubanel à 18h. – Durée 3h15.

« La seule chose qui m’intéresse, c’est de raconter des histoires… »

Emmanuel Serafini : Pourquoi monter Richard II ?

Christophe Rauck : Le point de départ de ce projet, c’est Micha Lescot. J’ai travaillé avec lui sur Départ volontaire de Rémi De Vos. On s’était bien entendus. Je me demandais comment retravailler avec lui. J’aime beaucoup cet acteur. C’est un comédien qui m’a beaucoup inspiré, surtout lorsque je l’ai vu dans La seconde surprise de l’Amour de Marivaux, mis en scène par Luc Bondy. Lui et Clothilde Hesme dans ce spectacle étaient formidables. Je m’étais dit « il y a vraiment quelque chose à faire avec Marivaux ». Je n’aime pas le terme moderne, mais, tout d’un coup, cet auteur m’était parvenu… J’avais trouvé le travail des comédiens extraordinaire et ce spectacle est pour moi une des plus belles mises en scène de Marivaux… Et c’est ce qui m’a donné envie de monter Les serments indiscrets… J’avais demandé à Pierre-François Garel de jouer dans ce spectacle car il a en lui – tout comme Micha Lescot et les grands acteurs et les grandes actrices – une élégance, une part de féminité et de masculinité qui viennent se rencontrer, et qui font toute sa force et sa vulnérabilité. Avec Départ Volontaire, cela a été pour moi une rencontre importante et j’ai glissé à Micha : « si tu as envie de jouer quelque chose, un rôle… fais le moi savoir ». Et puis un jour, il m’appelle et me parle de Richard II.

Cela a été suffisant ?

Oui, tout à fait. Je pense que les comédiens ont des rencontres avec des rôles. Ils sont les premiers à savoir – surtout les grands acteurs – ils ont, à un moment donné, une envie. Ils peuvent avoir cela avec des metteurs en scène ou des pièces. Je pense qu’il y a des fantasmes chez nous et chez les acteurs qui sont justes. Tout d’un coup, tu te sens prêt à affronter certaines grandes aventures. Je trouve que ça donne des choses très intéressantes. Le théâtre que je fais passe par les acteurs. J’ai toujours du mal à imaginer une pièce sans voir des acteurs. A chaque fois que je vois une pièce, je vois avant tout des acteurs.

Néanmoins vous auriez pu dire non ! vous aviez quand même un intérêt personnel à monter Richard II…

Ah non pas du tout, parce que je viens du Théâtre du Soleil et lorsque tu rentres au Théâtre du Soleil tu as « Les Shakespeare » qui te tombent dessus et notamment Richard II, d’autant que, dans Les Atrides, il y avait Georges Bigot – qui est devenu quelqu’un de très important pour moi – et, forcément, Richard II… c’était Ariane Mnouchkine et Georges Bigot. Alors, lorsque Micha m’a proposé cette idée, lorsqu’il m’en a parlé, j’avais ce souvenir en arrière-pensée. Mais en même temps, puisque je lui avais demandé, alors pourquoi ne pas le faire, puisqu’il en avait le désir… Donc, je lui ai dit oui. Et puis le Festival d’Avignon est arrivé. Ce n’était pas une demande du Festival d’Avignon, le point de départ c’est vraiment la rencontre entre ce rôle et Micha Lescot, et cette demande que j’ai faite et que j’ai voulu honorer…

Dans cette pièce, il y a une dimension politique importante et on n’est pas étonné non plus que vous vous y intéressiez. Trouvez-vous des similitudes avec des personnalités contemporaines et ce Richard II ?

Oui. Tout ce qui est dit dans la pièce se passe, c’est ce que je trouve intéressant : la force des mots et la puissance symbolique de certains personnages font que, ce qui est dit se réalise. Je dirais même que tout ce qui est dit est prédit. Et vous me demandiez si je vois des similitudes avec des personnages ou des situations contemporaines… Par exemple, je me souviens de Cahuzac et de ses comptes en Suisse. Ce qui m’a le plus gêné, ce n’est pas qu’il mente, ce que j’ai trouvé vraiment terrible, c’est qu’il ait menti dans le Saint des saints qu’est pour nous la Chambre des députés. Lorsque j’ai vu cela, lorsque j’ai entendu cela, je me suis dit : là il y a un verrou symbolique qui saute. Parce qu’on ne ment pas à cet endroit-là. Enfin, on n’a pas le droit de le faire. Dans mon travail de préparation, de réflexion, je relie les choses ensemble. Et ce qui s’est passé après en politique, dans la société est pour moi relié à cette chose-là aussi… Je ne dis pas que, parce qu’il a fait cette faute, les autres choses comme la décomposition de la gauche, la perte de confiance dans certains hommes politiques… sont arrivées par la suite, mais, en tous les cas, la parole d’un homme politique est toujours beaucoup plus forte parce qu’elle est habitée par la place symbolique qui l’occupe… Un jour je suis tombé sur une interview d’Emmanuel Macron qui disait à la BBC « j’aime gouverner le pays dans la tempête » et tout de suite après, éclatent les revendications des gilets jaunes. Puis l’affaire Benalla. Lorsqu’Emmanuel Macron a commencé à dire : « qu’ils viennent me chercher » et que les manifestants sont allés avec un Fenwick enfoncer la porte du Ministère de Benjamin Griveaux, pour aller, justement, le chercher… J’ai pensé : un président doit faire attention à ce qu’il dit, parce que, souvent, ça devient risqué, dangereux, inexcusable… Dans le même ordre d’idée, il y a eu aussi le discours de François Hollande au Bourget, avec le célèbre « mon ennemi, c’est la finance »… On ne peut pas gouverner comme ça. Il y a des mensonges qu’on est capable d’accepter et puis il y a des mensonges qui se retournent contre celles et ceux qui les disent. Ces paroles qui sont dites par des hommes politiques et, en l’occurrence, le premier d’entre eux, qui est le Président de la République, cela n’engage plus la personne, cela engage une nation, cela engage un pays, cela engage une histoire. Il est aussi question de cela dans Richard II avec la force du langage.

Avec ces références que vous avez données, dans quel sera univers scénique allez-vous situer l’action ?

Notamment sur la question de la destitution de Richard, je suis parti sur la Chambre des Communes britannique. On travaille avec des gradins et sur la destitution, par exemple, je veux vraiment que les gradins arrivent et qu’on se retrouve du côté du plateau en bi-frontal avec les spectateurs pour que la destitution se fasse vraiment face-à-face, spectateurs et acteurs. Je me suis dit, c’est intéressant de faire vivre une destitution, qui n’est peut-être pas celle qu’on vivrait aujourd’hui – et j’espère qu’on ne la vivra jamais -, mais en tout cas, essayer de partager cette expérience et de la ressentir à travers le théâtre. C’est cela mon point de vue, c’est avec cela que j’ai envie de dialoguer.

Vous parlez du décor, que va-t-il en être pour les costumes ?

Pour ce qui est des costumes, lorsque l’on regarde des documents ou photo du côté de la couronne anglaise, on se retrouve avec tout un apparat hétéroclite, cela devient un code vestimentaire très drôle et presque carnavalesque… Ce que je trouve intéressant, c’est de travailler sur les costumes d’aujourd’hui parce que je pense que le costume peut être aussi une barrière si on est trop dans l’époque. D’ailleurs qu’est-ce que c’est que l’époque ? Est-ce que c’est le 16ème, le 17ème ? Est-ce qu’on le met dans le 18e dans les années 40, etc. Toujours est-il que j’avais envie que le costume soit proche de nous, qu’on ait cette possibilité de transfert avec aujourd’hui.

C’est une pièce où il n’y a pas moins de 30 personnages est-ce que la troupe rassemblée va être aussi nombreuse ?

Dans la traduction de Jean-Michel Déprats, j’élague plutôt le début parce qu’à l’époque, les gens connaissaient les lignées, d’où venaient ces inimitiés entre familles. Aujourd’hui, on comprend les personnages à travers ce qu’ils disent plus qu’à travers leur historicité. J’ai essayé de ramasser les choses sur la question du duel pour rester dans l’action et dans la faute que va faire Richard sur la prise des biens de Jean De Gand suite à cette très belle scène où Richard se voit accusé de vendre l’Angleterre à ses courtisans. Cette faute politique va faire tomber Richard. Quant au nombre des personnages, nous travaillons justement pour trouver un vocabulaire sensible et pertinent pour éviter de perdre le spectateur par la multiplicité des rôles que doivent jouer les acteurs.trices.

Il y a, en Angleterre notamment, des destitutions, des abdications célèbres y compris dans l’histoire contemporaine de la Grande Bretagne et ailleurs, est-ce que vous ferez le lien avec des évènements historiques ?

Sur la question de la destitution, je m’intéressais à l’histoire de la Révolution… Nous, en France, on prend une guillotine, et on coupe la tête du Roi, qui est symboliquement extrêmement puissant, extrêmement fort et qui marque, qui va marquer toutes les sociétés à cette époque, jusqu’à la Révolution russe, puisque celle-ci s’inscrit directement dans la lignée de la Révolution française. Sauf que nous, on utilise la guillotine, donc un objet qui, symboliquement, crée une distance, même si la distance est très ténue, Il n’empêche qu’il y a un symbole, et puis, on passe en 1917… Il y a un révolutionnaire sanguinaire qui prend la famille royale russe, qui les emmène dans une cave, qui les assassine, qui les découpe… Là, on passe dans la barbarie la plus pure… Je ne dis pas que couper la tête du Roi n’est pas barbare, mais en le faisant à travers un objet aussi puissant que la guillotine, on reste encore dans le domaine du symbole. C’est une exécution. Quand on tue par balle des gens, c’est un assassinat… Tout d’un coup, la barbarie ne se cache même plus derrière une dimension symbolique. On se débarrasse des gens. On leur enlève toute leur humanité. Cette façon de se débarrasser des dominants, des gens qui ont le pouvoir, va orienter tout le pouvoir qui va se mettre en place. En France, ça a duré 4 ans, mais l’histoire soviétique va durer 70 ans. Je pense que la façon dont on se débarrasse des puissants va être la page sur laquelle va s’inscrire le nouveau pouvoir. La tyrannie qui a été mise en place par certains dirigeants soviétiques s’inscrit aussi dans la façon dont ils se sont débarrassés et dont ils ont assassiné le Tsar et sa famille. La destitution la plus incroyable de ces dernières années est celle de Dilma Rousseff au Brésil. Comment une femme présidente est destituée dans une démocratie au sein même du parlement brésilien par des hommes (pour la plupart) pour mettre en place un pouvoir illégitime et rétablir quelques années plus tard un gouvernement autoritaire d’extrême droite. La façon dont on destitue les puissants et la violence avec laquelle on les destitue va marquer le nouveau pouvoir pendant des années. Je trouve que ce qui est beau dans Richard II, c’est que Bolingbroke ne donne pas l’ordre d’exécuter Richard, même s’il en a envie et même s’il le fait indirectement, il ne peut pas le dire, car la question de la parole a justement toute son importance. Ce qui me plaît dans la pièce, c’est que Richard inverse tout. C’est lui qui a les mots. C’est lui qui tient la parole. Bolingbroke court après lui. Il est empêtré dans la parole et les mots de Richard. Cela ne peut pas se passer autrement que par la fin tragique du Roi, parce que, tant que le Roi est vivant, Bolingbroke n’a pas la légitimité d’un pouvoir royal inscrit dans une lignée « divine ». Donc l’assassinat d’un Roi coupe la relation entre le ciel et la terre. C’est intéressant aussi de se rendre compte que, quand on coupe la tête du Roi, ou quand on assassine le Tsar, on met par terre la religion, parce que tout ça va de pair… Le Roi ou le Tsar sont le lien entre le spirituel et le temporel, ils sont les représentants du pouvoir spirituel. Les soviétiques ont détruit les églises, juste après la révolution. Les Français ont imaginé une nouvelle religion en changeant carrément les mots, le calendrier. Aujourd’hui le pouvoir de Poutine s’appuie sur la religion orthodoxe avec la complicité du Patriarche Kirill pour légitimer son pouvoir autocratique. On voit bien que derrière l’assassinat d’un personnage royal, c’est à dire celui qui a reçu une onction divine, c’est extrêmement compliqué de pouvoir reprendre sa place et d’être à son tour consacré. Même si Bolingbroke fait partie de la famille, la guerre des deux roses va arriver très vite après son accession au trône. La prise de pouvoir par le biais d’un assassinat ou d’une exécution, a des conséquences – on ne va pas les mesurer tout de suite – qui seront intimement liées à la façon dont on va se débarrasser des personnes qui incarnent ce pouvoir. Richard II représente aussi un pouvoir en bout de course, un pouvoir qui n’est plus qu’endogamique avec juste quelques proches. C’est aussi ce que dit la pièce. On entend bien, à travers les uns et les autres, que Bolingbroke a le peuple avec lui, qu’il a le sol pour lui et que Richard n’est plus en relation ni avec le peuple ni avec le sol. J’ai envie de dire « le sol » parce que le peuple c’est la nation, en l’occurrence le Royaume et c’est aussi la terre. Ce n’est pas pour rien que le texte de Richard lors de son retour au Pays de Galles, commence par une déclaration d’amour à cette terre qu’il a, malheureusement pour lui, abandonnée pour la terre d’Irlande. Je me souviens de quelque chose qui m’avait bouleversé – forcément, lorsqu’on travaille sur une pièce, on est totalement obsédé, il y a des choses qui nous traversent dans notre quotidien et dans notre réflexion -, j’avais écouté une émission sur les carnets de doléances. Il y en avait des très belles. Notamment une femme qui disait pendant les gilets jaunes « nous sommes votre sol, vous nous marchez dessus, nous vous portons, vous êtes lourds, vous devenez de plus en plus lourds, attention à ce que le sol ne se soulève pas ». J’ai tout de suite pensé à Richard II et Bolingbroke.

Vous dites que Richard II est moins une tragédie psychologique que Hamlet où Macbeth, vous exposez néanmoins beaucoup de ressorts psychologiques pour nous exposer votre projet…

Dans Hamlet, il y a une vision psychanalytique entre la mère, le fils, le père, le fantôme et l’oncle. C’est cette histoire de famille assez complexe qui renvoie la pièce dans des zones obscures et fait que derrière la question du pouvoir, se joue aussi une question psychanalytique. Dans Richard II, il n’y a pas cela. Cependant, comme toute grande pièce, elle est empreinte d’une grande psychologie qui va permettre de relier l’œuvre à du concret, parce qu’on ne peut pas créer du vivant sans psychologie. Cela n’a rien à voir avec le jeu psychologique.

Croyez-vous que le public a besoin de ces classiques, comme on dit, est ce à travers ces œuvres là que, finalement, on arrive à lui faire prendre conscience aussi bien de l’Histoire et du monde contemporain.

Cette question du répertoire classique ou contemporain m’intéresse peu. Je pense que les grandes œuvres, quelles qu’elles soient, racontent des grandes histoires d’aujourd’hui. La seule chose qui m’intéresse, c’est de raconter des histoires. Il ne s’agit pas de se cantonner à raconter une histoire sans aucun point de vue sur notre présent. Ce qui me plaît, c’est que le théâtre raconte des histoires encore et encore depuis des siècles, et je pense qu’il en sera toujours ainsi parce qu’on aura toujours besoin que quelqu’un nous raconte des histoires pour comprendre qui nous sommes et dans quel monde nous vivons. Je ne vois pas de différence entre Dissection d’une chute de neige ou La faculté des rêves de Sara Stridsberg et Richard II. J’arrive à me projeter dans les deux. Après, théâtralement et dramaturgiquement, la forme qu’un auteur contemporain recherche dans ses récits est différente de celle d’un texte classique, et c’est passionnant. Mais je pourrais dire que les textes du répertoire classique m’ont appris à comprendre et à mettre en scène les textes contemporains.

Dans ces textes, quel est votre rôle de metteur en scène ? Comment envisagez-vous votre place ? Il y a plein d’exemples de très grands comédiens jouant Richard II et de très grandes mises en scène de Richard II de Shakespeare, quel va être votre apport, votre contribution à l’histoire de cette pièce ?

Ça je ne sais pas, je ne sais jamais… La seule chose que je me suis dite concernant les trois versions de Richard II qui ont été présentées en Avignon, c’est qu’elles ont toutes été jouées dans la Cour d’Honneur, donc en extérieur. Moi, je ne voulais pas travailler en extérieur. C’est peut-être la seule donnée qui est reliée, effectivement, avec les précédentes versions, du moins à Avignon. Après, les histoires viennent nous rencontrer, rencontrer notre quotidien, notre univers, et puis je n’y pense plus… Comment un tel l’a monté, quel point de vue il a pris, quel univers, quelle forme ? Cela n’existe pas. Je ne me dis pas lorsque je monte Marivaux, on ne l’a pas vu comme ça, alors je vais le faire comme ceci… pas du tout… Pour Marivaux, justement, le texte était très très écrit et je me suis simplement dit qu’avec une écriture aussi dense et si parfaite, il fallait des grands acteurs pour l’interpréter. La question que je me pose tout le temps, c’est le dialogue. Comment peut-on dialoguer avec un texte contemporain qui va parler d’une femme, pendant deux heures, qui a décidé, d’assassiner Andy Warhol… comment va-t-on parler d’une jeune femme qui ne veut pas se marier, tout simplement parce que son père le lui demande. C’est la même chose avec les costumes et les décors, quand tout est trop explicite et chargé, ça crée de la conversation, ça bavarde. Je cherche à dialoguer avec une pièce pour que la pièce dialogue avec les acteurs et qu’ils puissent dialoguer à leur tour avec le public… Des fois ça fonctionne, des fois ça fonctionne moins bien, mais c’est ça qui m’anime dans la mise en scène. La question de la forme est inhérente à la question du dialogue, puisqu’un dialogue se construit et fabrique une forme pour donner sens à tout cela. Une conversation ne construit pas, il n’y a pas de forme dans une conversation. Le théâtre, c’est dialectique. Les grandes pièces, qu’elles soient du répertoire ou qu’elles soient contemporaines, restent dialectiques. Elles ont besoin d’une forme pour parvenir au spectateur et donner du sens à la représentation. Je cherche toujours ce que je peux faire apparaître, puisqu’il y a des choses qui disparaissent avec le temps et l’histoire, mais la matière, la poésie et la vision de l’auteur, elles, restent là. J’essaie de travailler comme un sculpteur travaille la terre ou le fer. Après les structures des pièces sont différentes, les dramaturgies sont différentes. On a des dramaturgies plus classiques, des formes de récits plus complexes avec certain.e.s auteurs.trices contemporain.e.s. Les formes sont différentes mais les questionnements, les obsessions restent les mêmes… Il y a les pièces qu’on oublie un temps et qui ressurgissent tout d’un coup. Grandeur et misère du 3ème Reich de Brecht, pour moi était une pièce que je trouvais passée, un peu vieillotte… et puis j’ai vu un travail d’atelier et j’ai été surpris des résonances avec aujourd’hui qu’il n’y avait pas il y a 15 ou 20 ans. Je m’en suis même inquiété. Le monde change, nos obsessions changent et les pièces attendent le bon moment pour revenir et quand elles reviennent, certaines nous surprennent par leur pertinence. C’est en cela que le théâtre reste une sentinelle. Il nous informe sur le temps présent avec les grands écrits du passé.

Propos recueillis en mai 2022 par Emmanuel Serafini

Photo Martin Bureau / AFP

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