L’AVANTAGE AVEC LES ANIMAUX C’EST QU’ILS T’AIMENT SANS POSER DE QUESTION

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« L’avantage avec les animaux c’est qu’ils t’aiment sans poser de question » / txt de Rodrigo Garcia / mis en scène par Christophe Perton / au théâtre de l’Odéon du 15 janvier au 14 février / au théâtre du Jeu de Paume (Aix-en-Provence) du 17 au 21 février / durée estimée : 1h45.

L’entrée en scène est cyberspaciale : deux femmes et un homme arrivent sur le plateau, manteaux noirs ceinturées, lunettes sombres vissées, cadence assurée, visages fermés. Ambiance Matrix. Ils sont prêts à bondir comme des chiens, à penser comme des hommes. Car, maintenant, on ne peut plus faire semblant, on a vu le dessous des cartes, on sait tout. On sait que la mort est partout, à la fois début et fin. On voit le cancer, la mère malade qu’il faudrait songer à abandonner dans la forêt, le chat décrépi qui demande un peu d’amour, la lunette des chiottes semblable aux relations de travail. Bref, on a tout vu. Comment vivre alors ? L’avantage avec les animaux déconstruit la matrice, professe une foi radicale. Celle d’anges révoltés, d’étranges énergumènes, ou simplement d’humains trop humains dont les consciences acides se moquent de l’absurdité du réel, du bien-comme-il-faut, des salariés dans les restaurants, des chemins privés, de la gomina et surtout des polos Ralph Lauren.

Mais c’est drôle et méchant : on en joue. D’ailleurs, l’espace scénique est un terrain de jeu, de basket, clôturé par un grillage comme une cage. Le panneau tagué au fond a la couleur des zones marginales où errent ceux qui ne savent plus trop quoi faire. Les acteurs se passent la balle, la machine part et s’emballe, on déballe tout: les visions extatiques, les photographies du cimetière d’Igualeda, les poèmes de Quevedo et puis les saisons, les mouvements, les réflexes, les réflexions. Le langage coule, les mots se cognent, les insultes fusent, on est remonté à bloc. Les récits des comédiens se tissent par associations d’idées, ils forment une toile mentale, parfois étoilée par des éclats lyriques. Finalement, cette cage n’enferme pas, elle est le nouveau temple, le lieu d’expiation, le défouloir pour la foule justement.

Le texte de Garcia s’adresse à tous. C’est pourquoi la mise en scène de Christophe Perton puise dans les références populaires: tag, sport, mais aussi clip et pubs. Tantôt une actrice s’attache aux fils métalliques du grillage et ondule sur du hard rock avec la même rage que Shakira, dans le clip She Wolf (louve, d’ailleurs). Tantôt, un remake de la publicité Chanel de Jean-Paul Goude montre une comédienne oscillant sur une balançoire dans sa cage. En vérité, cette imagerie commune cherche à toucher tout le monde, car la violence et la beauté, c’est pour tout le monde. Et si certains spectateurs grondent ou partent, on s’en moque : au fond, ils doivent porter des polos Ralph Lauren.

Lou Villand

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