MATADOURO, LE CHAMP DE BATAILLE DE MARCELO EVELIN

Matadouro-Marcelo-Evelin-©-Sergio-Caddah

MATADOURO : Marcelo Evelin / CDN Humain Trop Humain, Montpellier.

Au nouveau CDN de Montpellier HTH (Humain trop Humain) se donnait Matadouro, œuvre originale de Marcelo Evelin, performer et figure emblématique de la nouvelle scène brésilienne. Ce spectacle souvent annoncé pour des festivals de théâtre était en en l’occurrence co-accueilli par Montpellier Danse. Et pour ce qui est de la danse, disons qu’il y avait des corps, mais peu importe le style, Marcelo Evelin se situe dans une recherche anti-conventionnelle où le mot limite n’a pas sa place, tout simplement il n’existe pas.

Ici 8 interprètes entrent en scène poursuivis par des aboiements de chien et appelés par le son abrupt de la percussion. Rapidement et comme si de rien sur le Quintette à cordes en ut majeur de Schubert ils s’exposent entièrement nus un large couteau collé à la poitrine, à la cuisse, au bas du dos… Seul le visage est couvert d’un masque de sorte que l’identité est réduite à néant. À mort les individus, nous sommes face à une multiplicité de corps ; des corps rendus au Matadouro, c’est-à-dire à l’abattoir, sans sensualité, sans érotisme si ce n’est au sens de Bataille où vie et mort conversent sans cesse. Ces 8 créatures se mettent à courir et ils courent ils courent dans une course cyclique quasi imperturbable.

Alors face à ces hommes bestialisés, un temps homme singe, un temps homme oiseau, un temps autre…, mais toujours dans une gestuelle simple, oui nous l’attendions la boucherie, ce revers de l’homme consommateur lui-même consumé par ses délires non nécessaires matérialistes. En vain, enfin pas tout à fait car si Marcelo Evelin ne va pas jusqu’à déshumaniser l’humain, il crée une communauté en marge entre sauvagerie et civilisation, une espèce sacrifiée et perdue, une espèce sur le fil du rasoir qui nous laisse perplexe. Et cette perplexité est si déroutante que le spectacle en devient une merveille philosophique, nous offrant un immense champ d’interrogations : que s’est-il passé, comment, pourquoi, dans quels sentiments ? Evelin ne donne a priori aucune réponse ni même aucune fin et c’est là l’audace, c’est là le don qu’il nous fait.

Aude Courtiel

Marcelo Evelin / Demolition Inc. + Núcleo do Dirceu
Conception, création Marcelo Evelin.
De et avec Alexandre Santos, Andrez Lean Ghizze, Eduardo Moreira, Fagão,
Izabelle Frota, Jaap Lindijer, Jacob Alves, Josh S., Layane Holanda, Marcelo Evelin, Regina Veloso et Silvia Sote.

marceloevelin sergio caddah

Photos Sergio Caddah

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