« VOODOO SANDWICH » : UN BON PUNCH ECHEVELE ET REVITALISANT

woodoosandwich1

Lausanne, correspondance.
«Voodoo Sandwich» d’Augustin Rebetez / Niklas Blomberg – Au théâtre de Vidy-Lausanne du 29 janvier au 8 février 2020.

Lorsque vous embarquez pour un spectacle signé Augustin Rebetez, déposez votre manteau et votre intellect au vestiaire, tenez-vous prêts à user de votre rétine et de votre ouïe et installez-vous confortablement: vous allez dérouiller!

En effet, l’auteur est avant tout plasticien. Son imaginaire est sombrement gothique et clairement burlesque. A l’instar d’un Thomas Hirschhorn, il crée un univers fait de récupérations, de matériaux précaires, modestes et éphémères. Augustin Rebetez est un bricoleur de première, un bidouilleur de sons et d’images, d’objets et de lumières, un barde futuriste dont le travail artistique semble jaillir pour secouer le monde, le réveiller enfin de sa léthargie, et partager une dynamique explosive. Ainsi, il a trouvé, en Niklas Blomberg, l’interprète rêvé de ses délires jubilatoires.

Le décor est constitué de sculptures et de mobiles informes qui semblent dégouliner d’une matière cireuse beigeasse, fugacement sublimées par certains éclairages. Une paroi défraîchie sert d’écran à des projections : portraits-collages dérangeants, empreints d’une étrangeté familière, mots-messages quasi subliminaux, monstrueux animaux des abysses. Des empilements sur roulettes composent un paysage chancelant et malgré tout dangereusement électrifié. Aussi habité que la scénographie, l’environnement sonore, mâtiné de techno-rock punk, participe de l’ambiance déjantée, entre onomatopées vocales et rythmes grinçants, douces paroles et stridences électroniques.

Des masques permettent à Niklas Blomberg d’endosser différentes personnalités, métamorphoses à la Rebetez: tête d’oiseau en carton scotché ou figures délabrées. Qu’il saute à la corde ou joue d’un mini clavier piano, sa virtuosité est patente. Il conjugue l’art de tout foutre en l’air avec un savant brio. Seul en scène, il l’occupe sans réserve, tel un faune échevelé et sautillant, un vieux débris bossu, un spaghetti fuyant ou même un poète mélancolique.

A l’issue de la représentation, après avoir récupéré mes esprits, je repense au vieux traînant son cerveau derrière lui, aux injonctions rapides sur l’écran, au jus de gingembre énergisant et je me dis que, oui, vitamine et colère manquent à notre monde anémié, oui, ce punch d’essence adolescente est vital!

Martine Fehlbaum,
à Lausanne

Laisser un commentaire

  • Mots-clefs

    Art Art Bruxelles Art New York Art Paris Art Venise Biennale de Venise Centre Pompidou Danse Festival d'Automne Festival d'Avignon Festivals La Biennale Musiques Palais de Tokyo Performance Photographie Théâtre Tribune
  • Archives