« LA VIE DE GALILÉE », OU LA GRAVITÉ LÉGÈRE DE SIVADIER
La vie de Galilée, de Bertolt Brecht, mise en scène Jean-François Sivadier / Du 27 mai au 21 juin 2015 au Théâtre Le Monfort.
On en avait brûlé un. Un homme qui avait osé affirmer que la Terre n’était pas au centre de l’univers. Mais Galilée, dans l’Italie du XVIIème, réitère : après avoir inventé sa formidable « lunette », il la braque vers les astres, donne des preuves, et voilà que le monde est à l’envers.
La pièce de Brecht dévoile un homme épris de pensée, dont la foi se situe par-dessus tout en… la raison de l’homme. Croyance problématique en un temps où l’Eglise et l’Inquisition affirment sans honte : « Vous n’avez pas le droit de savoir, mais vous avez toujours le droit de chercher », confirmant de façon certaine que le chemin de croix va être celui du scientifique.
Chez Sivadier, alors que Nicolas Bouchaud, toujours aussi habité, nous emporte dans les convictions inaliénables d’un homme qui ne cessera jamais de travailler à la signature de son œuvre – les Discorsi, la machinerie infernale des Puissants est ridiculisée dans une mise en scène qui emmène le spectateur au bout du rire. Tour à tour burlesques et effrayants, les moines et cardinaux s’enflamment de leurs propres croyances. Mais quand certains rayonnent de mégalomanie, d’autres se livrent dans une profonde sincérité – que serait un monde sans dieu pour les miséreux ?
La puissance de la mise en scène réside dans cet équilibre de funambule : elle rend poignant l’enfermement intellectuel de l’humanité, tout en faisant de son absurdité un phénomène hilarant. On se laisse alors joyeusement prendre dans ce combat entre le droit au doute et le devoir du dogme, jusqu’à en pleurer. De rire.
Aude Maireau