FESTIVAL D’AVIGNON : UNE « BRECHE » QUI NE LAISSE RIEN PASSER

la brèche

73e FESTIVAL D’AVIGNON. « La brèche » De Naomi Wallace – Mise en scène : Tommy Milliot au Festival d’Avignon 2019 du 17 au 23 Juillet.

Auteure américaine contemporaine originaire du Kentucky, c’est en 2015 que Naomi Wallace écrit « La brèche » (The MacAlpine Spillway) ou la découverte de la sexualité et de la notion de consentement par quatre adolescents. Sur scène le metteur en scène Tommy Milliot peint ce Kentucky des années 70 au travers du destin croisé de ces quatre jeunes issus de milieux bien différents. Sur scène va se jouer alors les destins d’une fille et de son frère qui logent dans une maison de banlieue et ceux de deux jeunes ados bien plus aisés qu’eux, amis et protecteurs au lycée du frère. Les trois jeunes gens vont utiliser le bas de la maison pour en faire leur QG et vont passer ce pacte jusqu’au-boutiste qui va sceller leur vie et conduire au suicide de l’un d’eux bien des années plus tard.

Sans décor, se servant uniquement de lumières pour esquisser quelques contours, Tommy Milliot, par un astucieux jeu de comédiens représentant les protagonistes jeunes ou plus âgés, fait voyager le public dans d’incessants flashbacks entre les années 90 et 70. Grâce à sept comédiens, la bande « d’amis » prend forme et les aller-retours d’époque apparaissent comme évidents. Démêlant peu à peu les fils de la tragédie – le suicide du jeune frère n’est alors que prétexte à la noire découverte de la cause passée – ce lourd secret sale et moite que chacun porte sur don dos tel un fardeau est dévoilé. Secret que le plus faible des quatre n’a pu porter plus longtemps sur ses épaules en se jetant d’un pont.

Sans remettre en cause outre mesure une mise en scène efficace à la façon d’un thriller dans la chaleur du Kentucky, il manque ce je ne sais quoi de réussite à ce spectacle pour réellement glacer le sang des spectateurs. On en sort tout au plus gêné mais sûrement pas bouleversé car en définitive on ne voit que très peu de choses sur les tourments de ces adolescents, futurs hommes en devenir, dont l’un, le plus fragile, écrasé par le passé, met fin à ses jours 20 ans après. On ne voit également que peu de chose de cet entre-temps, pendant lequel toutes ces destinées se retrouvent, soit broyées soit propices aux tourments de nuits passées à ne pas dormir et à regretter. En mettant exclusivement le focus sur les relations entre ces quatre protagonistes et non en cherchant et en montrant les dégâts intérieurs causés 20 ans plus tôt par cette funeste décision, Tommy Milliot, au travers de l’auteur, perd le spectateur dans ce qui ne reste en fait qu’un lourd secret et qui aurait pu être la description plus profonde et bien plus forte de la destruction d’une vie en devenir.

Pierre Salles

Photo © Alain Fonteray

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

  • Mots-clefs

    Art Art Bruxelles Art New York Art Paris Art Venise Biennale de Venise Centre Pompidou Danse Festival d'Automne Festival d'Avignon Festivals La Biennale Musiques Palais de Tokyo Performance Photographie Théâtre Tribune
  • Archives